jeudi 31 août 2017

Survivre - Frederika Amalia Finkelstein

Survivre

Fréderika Amalia Finkelstein























Gallimard
L'arpenteur
144 pages,
Parution 17/08/2017
ISBN : 9782072741241
Prix :

Présentation de l'éditeur


«Le soir du 13 novembre, j’ai compris que la guerre pouvait éclater en bas de chez moi – une forme inouïe de guerre. La peur et la méfiance sont devenues normales : je vis en attendant le prochain attentat. 

Le soir du 13 novembre, ma génération s’en est prise à elle-même : les assassins avaient le même âge que les assassinés. 

Survivre est un hommage à cette génération, née avec les écrans, ultraconnectée, et pourtant en proie à une immense solitude. 

Nous voulons être libres : parfois pour le meilleur, parfois pour le pire.» 


Frederika Amalia Finkelstein.

Mon avis

Merci aux éditions Gallimard et à Babelio pour cette découverte de la rentrée littéraire.

Un livre dont on ne sort pas indemne.  Quelle claque !  On en sort un peu secoué, dérangé et on réfléchit.

Je vous avoue que j'ai dû m'accrocher au début de la lecture car cela dérange, c'est dur, difficile.

La narratrice est jeune, elle est marquée par la soirée du 13 novembre 2016. Elle ne peut s'empêcher, fascinée, d'observer continuellement, obsessionnellement la photo des corps dans la fosse du Bataclan.

Lorsqu'elle court, elle se passe en revue mentalement les victimes des attentats, des diverses catastrophes du genre dans le monde.  Elle est continuellement angoissée et attend avec méfiance et peur le prochain attentat.

C'est la peur au ventre qu'elle prend les transports en commun.

C'est l'histoire d'une génération des 23-28 ans, qui depuis sa plus tendre enfance vit dans un monde virtuel, dans la violence des jeux vidéos "GTA ... etc..", et qui banalise au final le sang et la mort.

Elle fait partie d'une génération "inter-connectée" et reçoit des notifications à chaque fois qu'il se passe un acte terroriste ou tout acte glauque (un suicide en direct) partout dans le monde, car il se passe toujours quelque chose dans le monde, à chaque seconde, alimentant encore plus sa peur et son trauma.

Sa grand-mère est morte, elle devrait prendre l'avion pour se rendre à l'enterrement avec sa soeur et sa mère.  Elle se questionne, ira-t-elle les rejoindre ?

Je ne vous en dis pas plus car petit à petit les choses s'interconnectent, apporte un sens plus profond.

Le début de lecture m'a au départ un peu perturbé mais la magnificience de l'écriture qui porte littéralement le récit, m'a happée et emmenée rapidement au terme de celui-ci.

Un récit qu'il faut laisser "descendre", qu'il faut "digérer" et qui prend tout son sens après la lecture.

Ma note : 7.5/10

Les jolies phrases

Quand la mort se lève devant vous et qu'elle vous frôle, ne demeure qu'un mot : survivre.

Faites attention avec ça : le doute est un cancer, il se répand invisiblement dans votre corps jusqu'à exterminer vos rêves.

...cela ne finira pas , mon mur, comme ma mémoire, ne sont pas assez vastes pour contenir toutes les catastrophes, il faut donc sans cesse faire preuve d'humilité et d'organisation : la plupart des atrocités me fileront entre les doigts.  Il est de mon devoir de ne pas les retenir.

Le monde occidental les a élevés dans un climat de violence économique très fort.  Partir faire la guerre peut leur procurer un sentiment de liberté inouïe, ils se sentent enfin utiles, liés à une cause absolue, défenseurs d'une voix qui rompt avec tout ce qui leur a été imposé.  En réalité, ce n'est pas une guerre de religions, c'est une guerre économique et morale.

Car être beau c'est être mince.  Et être mince, c'est aller à l'essentiel.  Je suis obsédée par la minceur : au moins autant que par le sport. Être mince, c'est être pur - au moins tendre vers une forme de pureté.

Il y a des jours instables, menaçants, où le peu de choses devraient être sûres et acquises ne l'est absolument plus : ce jour est un de ces jours où tout se met à trembler.  Où l'on se trouve nu dans le vertige du monde.  Il n'y a pas de paix. Pas d'autre rive à rejoindre : tout n'est qu'un seul monde, pas de versant surlequel trouver refuge.

Si Dieu a créé le monde, il a créé le mal.

Je n'ai pas connu la faim.  Je n'ai pas connu la drogue.  Je n'ai pas connu la torture.  Pour moi la violence se limite aux images, et à l'endurance dont je dois faire preuve pour chaque jour les ingurgiter : ne pas succomber aux écrans. Garder un lieu dans ma tête, si infime soit-il, un lieu dénué de bruit, d'agitation, un lieu dépourvu de haine.  Pour l'instant les livres me protègent.

Le monde saigne et nous comptons nos morts.  La haine se répand nuit et jour, il n'y a pas de trêve aux attentats et aux massacres, elle se déverse et nourrit le noyau de la terre. Marre de voir la déchéance triompher, de voir le monde en lambeaux, de voir le monde au bord de mourir éclaté en millions de petits corps sacrifiés pour rien.  La paix n'existe plus.

La violence a métastasé le monde tel un cancer pourrissant un corps en secret.  Nous avons laissé faire.  Nous n'avons rien compris.  Et voilà qu'elle se venge.


challenge rentrée littéraire 2017


2 commentaires:

Ferhat a dit…

Je n'ai pas pu trouver cette citation dans Survivre: "Si Dieu a créé le monde, il a créé le mal." Pouviez-vous le citer en mentionnant le page s'il vous plaît?

nathalie vanhauwaert a dit…

Lu il y a deux ans, impossible de vous donner la page mais c'était bien dans le livre.